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Et songe que l’orgueil qui les outrage en moi,
Intéresse leur foudre à descendre sur toi.

HELVIE

Je sais qu’un vif rayon de leur toute-puissance
Doit briller sur le front de ceux de ta naissance,
Mais si tu veux en toi me le voir respecter,
À nos yeux sur le tien fais qu’il puisse éclater.
D’un juste Prince en tout soutiens le caractère,
Et fais ce que les Dieux t’ont ordonné de faire.
Pour voir si leur respect règle tes actions,
Jette un moment les yeux sur tes proscriptions.
Vois de là sous ton nom tes provinces pillées,
De leur premier éclat tristement dépouillées,
Servir d’injuste proie à qui veut s’enrichir
Dans d’infâmes emplois ne craint pas de blanchir.
Vois-y, vois-y partout ce funeste ravage
Qu’exercent d’autre part l’avarice et la rage,
Lorsque de ton pouvoir leurs Tyrans revêtus
Se font de tes forfaits d’éclatantes vertus,
Et que pour t’imiter dans tes noires maximes
Regardant tes Sujets comme autant de victimes,
Ces demi-Souverains par de lâches rigueurs,
S’en immolant les biens, t’en dérobent les coeurs.

COMMODE

Ta haine à tort sur moi par là s’ose répandre.
Si le désordre est tel me le vient-on apprendre ?
Me vient-on expliquer ces secrets attentats ?

HELVIE

Et qui les doit savoir si tu ne les sais pas ?
Le Ciel t’a-t-il commis la puissance suprême
Pour la voir confiée à d’autres qu’à toi-même,
Et quand sur tes Agents tu fais tomber son poids,
Dois-tu à l’État répondre de leur choix ?
As-tu droit d’oublier qu’un conseil infidèle
Peut souvent éblouir, ou surprendre leur zèle,
Et qu’en eux comme en toi dans les moindres projets
L’ignorance ou l’erreur ne s’excusent jamais ?