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Scène V

I. MARCIA, ÉLECTUS, LUCIE
MARCIA

L’on me brave,
ÉLECTUS
, et ma triste disgrâce

D’un orgueilleux mépris accroît l’indigne audace,
De mon jaloux destin il suit la trahison.
Tu la sais, tu la vois ; m’en feras-tu raison ?
Je l’attends de toi seul d’un Trône qu’on me vole,
De sa possession tu m’as porté parole,
Et si toujours la gloire est dans ton souvenir,
Par ton seul intérêt tu me la dois tenir.

ÉLECTUS

Madame, plût au Ciel que mon sang, que ma vie
Fût le prix des grandeurs que le Sort vous envie,
Vous le verriez sur l’heure à vos pieds répandu
Vous assurer l’éclat du rang qui vous est dû,
Et par ce sacrifice offert à votre gloire
Mon cœur de mon amour consacrer la mémoire.
Mais puisque l’Empereur s’est voulu déclarer,
Il n’est plus rien pour vous qu’on en puisse espérer.
Malgré le fier refus qui doit aigrir sa flamme,

Il n’adore qu’
HELVIE
elle règne en son âme,

Et j’emploierois en vain tout ce que je vous dois
À forcer sa raison de vous rendre sa foi.

MARCIA

De ta parole en vain par là tu te crois quitte ;
Non que d’un plein effet mon cœur te sollicite,
Mais puisqu’en mon injure elle doit t’engager,
N’y pouvant mettre obstacle, aspire à me venger.
Par une belle audace empêche qu’on ne pense
Qu’avecque l’Empereur tu fus d’intelligence,
Et d’une indignité que je méritois peu
Va dans son lâche sang signer le désaveu.