Et malgré moi sans cesse une secrète horreur
Me fait trembler pour vous au nom de l’Empereur.
Donc les Dieux font briller leurs plus nobles ouvrages,
Et l’on voit son destin dans un rang glorieux
Compter depuis Trajan une suite d’Aïeux ;
Mais s’il en prit d’abord un orgueil légitime,
Il s’en est bientôt fait un appui pour le crime,
Et dans les cruautés qu’il nous fait éprouver,
Qui peut souffrir son choix, semble les approuver.
C’en est trop, et j’ai lieu d’accuser votre zèle
S’il condamne la gloire où le Destin m’appelle,
Et si ce fier orgueil dont il se fait des lois,
Oppose un vain scrupule à l’éclat d’un beau choix.
Mais le Trône, ma sœur, adoucit bien des crimes,
Et peu dans les plus noirs verroient assez d’horreur
Pour y refuser place auprès d’un Empereur.
D’une main odieuse il pourroit me déplaire.
Vous faites vanité d’une vertu sévère ;
Mais pour vous jusqu’ici quelque appas qu’elle ait eu,
C’est un crime à la Cour d’avoir trop de vertu.
Ces actions par elle exactement guidées
N’y semblent tenir lieu que de belles idées,
Quelque sentier qu’elle offre, on prend le moins douteux,
Et qui peut s’élever ne croit rien de honteux.
Je n’ai pas de la Cour assez d’expérience
Pour en avoir sitôt pénétré la science,
Et n’y songeant qu’à fuir de lâches intérêts,
J’en ignore aisément les plus nobles secrets.
Je sais que le défaut d’une haute naissance
Du rang que nous tenons nous ôtait l’espérance,