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ACTE IV



Scène I

Le Roi, Bérénice, Araxe, Clitie.
ROI
, tenant le billet d’Araxe.

Oui, ma fille, le sang par un vif caractère
Me traçoit dans tes yeux l’image de ta Mère,
Et ces aimables traits imprimés dans mon sein
Cherchoient à prévenir ce gage de sa main.
Mais sans un tel secours la Nature muette
Ne pouvoit de ton sort se faire l’interprète,
Et son aveuglement affaiblissoit ses droits,
Lui faisoit dans mon cœur méconnoître sa voix

BÉRÉNICE

Pour s’expliquer au mien souvent avec adresse
Elle a su de mon zèle emprunter la tendresse,
Et j’ai cent fois, Seigneur, répondu malgré moi
Par un respect de fille aux bontés ce mon Roi.
Mais après vos bienfaits versés en abondance,
J’imputois cet effet à ma reconnoissance,
Et mon cœur, que par là mon destin abusoit,
Pensoit l’entendre mieux, plus il se déguisoit.

ROI

Ô Phénice ! Ô billet de la main la plus chère
Qui d’un Roi malheureux pût faire un heureux père !
Enfin vingt ans passés en troubles intestins
Nous ouvrent une voie à de meilleurs destins ;
Nous voyons à l’État Bérénice rendue.
Araxe, c’est à toi que la gloire en est due,
Je lui donnai la vie, et ton zèle à son tour
A su lui conserver et le Sceptre et le jour.