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ACTE III



Scène I

Bérénice, Philoxène, Clitie.
BÉRÉNICE

Quoi, ma flamme, peut-être à s’expliquer trop prompte,
D’un si sensible outrage, a mérité la honte,
Et d’un fatal revers l’indispensable loi
Vous souffre une vertu dont vous doutez en moi !
Est-ce ainsi qu’en m’aimant vous m’avez dû connoître ?

PHILOXÈNE

Mon trouble est assez grand sans chercher à l’accroître,
Et ce reproche injuste accable un malheureux
Qui craint d’être cru lâche étant trop généreux.
Au moins dans ce revers à mes vœux si contraire
Ne jugez pas si mal de ce que j’au dû faire.
Du sort le plus cruel je me vois combattu,
Pour en parer l’assaut je n’ai que ma vertu,
Et dans ce dur combat où mon âme étonnée
À ses seules clartés craint d’être abandonnée,
Est-ce trop peu répondre à ce que je vous dois
Que de vous faire arbitre entre le sort et moi ?

BÉRÉNICE

Oui, puisque les grands cœurs jugeant par eux d’un autre,
Vous avez dû régler ma vertu sur la vôtre,
Et ne me croire pas si facile à changer,
Que du parti du sort je pusse me ranger.