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Scène IV


Dom Lope, Dom Alvar, Cassandre

Cassandre

Et bien, cruel amant, découvre mes foiblesses,
Je viens les avouer puisque tu les confesses,
Mais je demande aussi que de justes effets
Montrent ton cœur d’accord de l’aveu que tu fais.
Ce beau feu dont l’ardeur dût être si certaine
Ne s’explique pas bien par des marques de haine,
Et poursuivre le frère avec tant de rigueur
C’est prouver assez mal ton amour pour la sœur.
Respecte en lui mon sang si j’ai droit d’y prétendre,
Ou dis que tu me hais si tu le veux répandre,
Et dans tes sentiments un peu mieux affermi,
Sois amant tout à fait, ou bien tout ennemi.
D’accord de : préposition acceptée à l’époque.

Dom Alvar

Dom Lope, c’est ainsi qu’avec toute assurance
J’ai pu de mon secret vous faire confidence ?

Dom Lope

Ne me reprochez rien quand mon cœur abattu
Soupire du long temps que vous me l’avez tu.

Cassandre

Quoi, ta haine est pour lui déjà si violente
Qu’elle a peine à souffrir l’obstacle d’une amante,
Et quand elle s’apprête à lui ravir le jour,
Pour la faire trembler c’est trop peu que l’amour ?

Dom Alvar

Hélas ! Et plut au Ciel qu’une si belle flamme
Vous éclairât assez pour lire dans mon âme.
Vous m’y verriez encore préférer hautement
Au titre d’ennemi la qualité d’amant,
Détester autant l’un que je respecte l’autre,
Mais enfin ma vertu se règle sur la vôtre ;