Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 2, 1748.djvu/176

Cette page n’a pas encore été corrigée
Dom Alvar

Ah, mon père.

Dom Sanche

Je puis donc te revoir ?

Dom Alvar

C’est donc vous que je vois ?

Dom Sanche

Ah, qu’avec que raison tu doutes si c’est moi !
Dans l’affront que je pleure et qui me désespère,
Tu peux, tu peux, mon fils, méconnoître ton père.
La rougeur de mon front t’empêche d’y trouver
Ces traits que la Nature y sut jadis graver,
Tu les cherches en vain, mais sûr de ma vengeance,
Si je dois aujourd’hui t’expliquer mon offense,
J’ai l’avantage au moins qu’en ton ressentiment
Tu n’auras de ma honte à rougir qu’un moment.

Dom Alvar

Ce moment est trop long, hâtez-vous de m’apprendre
Quel sang pour l’effacer il faut aller répandre.

Dom Sanche

Te dirai-je, mon fils, que l’affront est si bas,
Qu’il seroit trop vengé, s’il l’étoit par ton bras ?
Pour un lâche ennemi capable de surprise
La générosité n’est pas même permise,
Ne t’inquiète point de mon honneur perdu,
S’il lui faut une vie, on m’en a répondu,
Il périra, le traître.

Dom Alvar

Ah, que voulez-vous faire ?

Dom Sanche

Te remettre en état de m’avouer pour père.

Dom Alvar

Me réserveriez-vous à cette lâcheté,
De souffrir…

Dom Sanche

Il aura ce qu’il a mérité.
Où l’offense est indigne et basse et lâche et noire
Tout ce qui la répare est toujours plein de gloire,