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Dom Lope

Et vous serez sa femme ?

Jacinte

Moi ! Cette lâcheté pourroit m’entrer dans l’âme ?

Dom Lope

Que m’avez vous donc dit, ou qu’est-ce que j’apprends ?
Et comment accorder deux points si différents ?

Jacinte

Si pour les accorder vous manquez de lumière,
Connaissez aujourd’hui mon âme toute entière,
Et de l’heur d’un rival cessant d’être jaloux,
Confessez que mon cœur étoit digne de vous.
L’espoir de mon hymen n’est qu’une attente vaine,
Sous ce trompeur aveu je le livre à ma haine,
Et lui donnant la main, je sème un faux appas,
Qui sans aucun soupçon l’attire dans mes bras,
Où ma main dans son sang, au gré de mon envie,
Venge avec mon honneur le repos de ma vie.
Êtes-vous satisfait ?

Dom Lope

Hélas ! si je le suis,
Vous même jugez-en, jugez si je le puis.
Par lui seul votre honneur à l’outrage est en bute,
Et quoi que contre lui votre haine exécute,
Après le noir effet de son lâche dessein
Il mourra glorieux, s’il meurt de votre main.
Non, il faut que par moi sa mort vous satisfasse,
Qu’elle soit un supplice et non pas une grâce.
Le plus rude trépas lui deviendroit trop doux
S’il avoit pu se dire un moment votre époux :
Au nom de cette amour ferme, pure, sincère…

Jacinte

Brisons-là, je crains trop le retour de mon père,
Éloignez-vous, de grâce, et recevez ma foi
Que je me souviendrai de ce que je vous dois.

Dom Lope

Ah, Madame, ajoutez…