Page:Suzanne de Callias La malle au camphre 1919.djvu/75

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— Ah ! elle est bonne, celle-là !… Voyez-vous ça !… Bah ! vous faites bien. Une femme intelligente comme vous peut aller partout… Je suis bien content de vous rencontrer, vous savez ça me donne l’occasion d’échapper à un terrible type ; vous voyez ce petit brun maigre, qui a une barbe rare, dans la porte ?

— Oui, il a les yeux assez égarés.

— C’est Foret, le caricaturiste ; un gaillard qui a un rude talent, mais il s’est pris d’une toquade malheureuse pour le haschich, et, à chaque instant, on le trouve sous l’influence de la drogue. Ce soir, il se croit dans un temple où l’on célèbre les mystères de Kama, dieu de la génération, ou quelque chose comme ça ; et il s’obstine à voir en moi une bayadère androgyne aux yeux prometteurs de voluptés ; ça devient rudement gênant, vous savez… »

J’éclate de rire ; et nous voilà partis à bavarder sur les paradis artificiels avec une simplicité de bons camarades ; seulement, à la vérité, je remarque que Barral, par moments, détourne brusquement ses yeux des miens et que mon genou ayant heurté le sien, il replie ses jambes sous le fauteuil avec une précipitation voulue. Puis, comme un ami l’interpelle dans le fond de la salle, il s’excuse en bafouillant un peu, se lève et file le rejoindre.