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plutôt grivoises, « le Fiacre », «. Ah ! vous dirais-je maman », etc., nasillées par une grande fille, mélancolique et pas jolie, cette Yvette Guilbert dont les artistes commencent à parler avec enthousiasme, alternent brusquement avec « la Mort de Jésus », de Marcel Legay, sur les paroles mêmes de Renan, et « l’Hôtel-Dieu », de René Esse, sombre déclamation d’un socialisme larmoyant… Je ne comprends pas beaucoup. Se moque-t-on du public ici, ou est-ce un public qui se réunit pour se moquer de tout le monde ?…

Tandis qu’une tempête d’applaudissements accueille la fin d’une poésie assez amusante de Maurice Donnay, je vois un jeune homme debout au milieu d’un groupe, qui me salue en soulevant son feutre, d’un air assez gêné. C’est Marcel Barral. Voici deux mois que je ne l’ai revu, et nous ne nous écrivons jamais. Comme je réponds à son salut avec un empressement cordial, il se faufile à travers les rangs et vient s’asseoir sur un siège resté libre à côté du mien.

« Vous ici, Mademoiselle Thyra ! Une vierge de l’Edda dans un cabaret montmartrois !

— Mon Dieu, oui ! N’en dites rien à Mme Bol surtout ; elle me croit en train d’écouter Werther à l’Opéra-Comique !