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songer à une chose que j’ai vue exprimée bien souvent déjà dans la littérature de votre école « naturaliste ». Tous vos intellectuels, Goncourt, Baudelaire, Zola, Verlaine, Gavarni, que sais-je ? se sont plaints amèrement de la stupidité des femmes de noce, dont quelques-uns, d’ailleurs, tels que Baudelaire et Verlaine, faisaient leurs uniques compagnes. C’est vraiment naïf. Car enfin, qu’on se représente l’envers de la situation : une réunion de femmes d’une certaine culture intellectuelle, invitant pour s’égayer des garçons de café, lads d’écurie, ou figurants de théâtre ; cela semble absurde ; et cependant ces messieurs sont exactement de la même catégorie sociale que les « folles hétaïres » de n’importe quel degré. La plus luxueuse d’entre elles — et vous en convenez tous — sent toujours l’eau de vaisselle et la brosse à cirage, qu’elle a peut-être quittées la veille, et le fossé est toujours aussi énorme, qui la sépare de ses intellectuels compagnons. Ce serait parfait s’ils ne s’en apercevaient pas. Mais pourquoi diable s’en plaignent-ils ? et à qui la faute ?

— Vous parlez d’or, chère amie ; mais par qui voulez-vous que nous remplacions ces laveuses de vaisselle, plus ou moins frottées d’opoponax, quand nous avons envie de nous réunir pour rigoler un brin ? Est-ce par vous et vos jeunes camarades ?