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équivalent à peu près aux trente-huit ans d’une Parisienne habilement présentée par le coiffeur, le parfumeur, et la manucure.

Oui, très bien. Mais Barral m’aimait dans le temps où j’étais inférieure physiquement — et moralement — à ce que je suis aujourd’hui… Il y a des choses qui ne se discutent pas. On m’a montré dernièrement, dans un milieu universitaire, un fort beau jeune homme qui est sur le point d’épouser, au grand désespoir de sa famille, une sorte de cantatrice mondaine âgée de cinquante-trois ans, maigre, ravagée comme un cholérique à sa dernière période, sous son maquillage et sa perruque rousse ; tarée, criblée de dettes, impossible… Et pour se consacrer à cette idole, il a rompu avec une charmante jeune fille, très jolie celle-là, qui en est désespérée… Décidément, l’Amour désigne ses partenaires absolument au hasard : Titania et l’homme à la tête d’âne…

Allons, pourquoi suis-je si amère ce soir ? Je ne vais tout de même pas comparer Bottom à la Thyra que j’étais alors ! L’histoire de Barral est parfaitement logique, en somme. Et puis, je suis sûre qu’il a un réel plaisir à me revoir aujourd’hui ; et ce plaisir s’accentuera certainement si je le veux. Les hommes ne sont pas tellement difficiles à prendre…