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conversation, peu à peu, glisse en arrière, vers le passé parisien d’il y a vingt-sept ans. L’image de ma visite à l’atelier de la place Dauphine obsède soudain ma pensée ; je me revois, petite fille blonde, froide, ignorante d’elle-même, assise près de lui, sur le vieux divan recouvert d’un crépon japonais ; et il me semble tout à coup que les rôles, à présent, sont changés…

« Vous souvenez-vous de la visite que je vous avais faite, Barral, un jour où vous vous battiez avec le poêle qui ne voulait pas marcher ?… » J’interroge avec un sourire inquiet, la voix précautionneuse.

« Ah ! oui, c’est vrai ; vous êtes venue me voir dans cette maison crasseuse et antédiluvienne… » Le son de sa voix ne décèle qu’une bonne humeur amusée. « Ça me fait toujours plaisir de me rappeler ces vieux souvenirs-là… Nous avons passé de bons moments ensemble ; en nous taquinant tout le temps, d’ailleurs…

— C’est égal, vous avez été bien gentil pour moi, à ce qu’il paraît, au moment de mon examen ; Cardoc me l’a dit depuis. Vraiment, Barral, j’ai été très, très touchée de savoir que vous aviez fait cela sans m’en parler jamais, sans vous faire valoir, même ensuite, quand — je m’en souviens très bien — j’ai