Page:Suzanne de Callias La malle au camphre 1919.djvu/14

Cette page n’a pas encore été corrigée
— 4 —

je l’accompagne toujours… Mais vous êtes un peu Américaine, à ce que je vois… Et vous êtes venue ici pour suivre les cours de l’École du Louvre ?

— Oui, Madame ; je pense préparer ma thèse sur un peintre de l’école primitive française, Jean Fouquet peut-être.

— Une jeune fille savante, tout à fait. C’est charmant ; vous ne devez jamais vous ennuyer… Mais je vais appeler ma fille qui va vous montrer votre chambre. »

La dame se lève dans le bruissement de sa robe de soie puce, et disparaît dans la salle à manger voisine. Elle est maigre et longue ; son visage, si étroit qu’il semble avoir été aplati entre les feuillets d’un livre, est figé dans un immuable sourire. Ses cheveux en bandeaux, bien pommadés, dessinent deux petites vagues correctes, très haut sur son front ; au lobe de ses oreilles, bourrées de coton rose, grelottent deux poires d’améthyste.

Je regarde autour de moi. Ce petit salon, formant le coin d’un rez-de-chaussée sombre, est digne de Mme Bol, la maîtresse de céans. Il exhale une pénétrante odeur de cave et de vieille tapisserie ; dans un demi-jour verdâtre, cinq à six fauteuils, tout ronds en capiton de soie bleue, figurent cérémonieusement