Page:Suzanne de Callias La malle au camphre 1919.djvu/129

Cette page n’a pas encore été corrigée
— 119 —

de mon ancien quartier ; seulement, si les femmes sont jeunes, les hommes ont plutôt la barbe grise, sauf trois ou quatre à type étranger. Le grand gaillard en manches de chemise (le maître de céans) sort
d’un réduit obscur, toujours sa pipe à la bouche, tenant par l’anse une grosse marmite fumante. Il crie : « Eh bien ! à table les enfants ! Charlette, voulez-vous venir me passer les assiettes ? » je me retourne vivement, et aperçois une longue jeune fille brune aux nattes en colimaçons, qui apporte au grand barbu des assiettes pour la distribution de la soupe. Bientôt elle s’asseoit, presque en face de moi, et mange tranquillement, tandis qu’un petit modèle aux yeux cernés de khol se charge d’aller chercher le plat suivant : un bœuf aux oignons et aux carottes qui n’est vraiment pas mal cuisiné.

Je contemple Charlette pendant quelque temps. Elle ne me rappelle que bien vaguement l’enfant de trois ans, si drôlichonne dans sa courte jupe drapée en « pouf », qui promenait à travers la cité un ballon