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J’ai continué d’éprouver cette sensation étrange en revoyant Mme Mouton, qui est une Mlle Bol conservée comme ces couronnes de mariée en cire jaunie que les concierges mettent sous des globes de verre. Elle a même encore maintenant le « filet » invisible de sa jeunesse, dont le quadrillé ténu se voit très bien sur ses frisons maigres. Elle me dévide d’affligeantes banalités, dans son salon où je reconnais des meubles de jadis, et me raconte que sa belle-fille suit les cours de la Schola Cantorum. « C’est une jeune fille fin de siècle », déclare-t-elle sans paraître se douter que ce siècle finissant est remplacé par un autre depuis dix-huit ans révolus.

Malheureusement, tout ce qu’elle peut me dire sur les Rousset, c’est qu’une camarade de sa fille va parfois dîner dans une cantine pour artistes dont s’occupent Lucien Rousset et sa cousine Charlotte. Elle me promet de m’envoyer l’adresse de cette cantine.

Le lendemain soir, munie de l’indication qu’elle m’avait ponctuellement fait parvenir, je me dirige vers la rue du Moulin-de-Beurre, une des dernières