Page:Suzanne de Callias La malle au camphre 1919.djvu/124

Cette page n’a pas encore été corrigée
— 114 —

« Tiens, c’est étonnant ; il était pourtant là-dessous : un grand album recouvert en peluche rouge… N’importe ; on vous reconnaît encore très bien. Mère sera bien contente de vous revoir ; elle reçoit le mardi… » Elle bavarde encore un instant, très aimable et n’écoutant que la moitié de mes phrases. Ça, par exemple, c’est une des choses qui vous impatientent un peu quand on vient de l’étranger ; cette manie française de vous couper la parole toutes les cinq minutes…

Puis elle s’écrie soudain :

« Et votre malle, au fait ?

— Quoi ? quelle malle ?

— Non ! vous ne vous rappelez pas !… vous aviez laissé votre malle en partant de chez grand’mère Bol…

— Mais c’est pourtant vrai ! Comment, elle est toujours là ?

— Je crois bien ! au sixième… c’est roulant ! Mère m’a raconté ça souvent ; c’est un remords pour elle que cette malle ! Il paraît que vous aviez écrit pour demander qu’on la renvoie, n’est-ce pas ? et puis, vous aviez oublié de remettre votre adresse à Christiania, et on l’avait perdue. Grand’mère l’a fait demander à des voisins d’en face, un peintre qui vous connaissait ; mais il ne la savait pas. Là-dessus, grand’mère est morte d’une pneumonie ; et puis en-