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pu en vivre éloignée, pendant ces vingt-sept ans ; cependant, j’y pensais parfois parmi les pierres et les arbres des cités scandinaves, russes, allemandes ou anglaises au milieu desquels s’est passée mon existence sans racines ; et toujours se présentait à mon esprit le petit béguinage emmitouflé de plantes grimpantes, avec la pompe où l’on venait remplir ses brocs, et la concierge écossant des petits pois devant sa loge rustique. Ou bien, des rues biscornues et sentant la vespasienne, barrées par des remparts de voitures maraîchères, entre lesquelles louvoyaient de retentissants omnibus à chevaux. Évidemment, tout cela avait dû changer. Mais, tout à coup, il fallait que je revoie les lieux où avaient évolué ces êtres et ces choses ; il fallait aussi que je voie où en était ce peuple — un peu le mien — qui avait étonné l’Europe, et moi la première, par une force qu’on croyait abolie, et que beaucoup de mes puritains amis anglais représentaient comme ayant abjuré ses vieilles erreurs, ses byzantinismes passés, — retrouvé la voie de la Vertu et de la Vérité…