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que le vénérable et immense Trinity College, l’orgueil de Cambridge.

Ayant eu, vers sa dix-huitième année, des velléités de peinture, il avait passé un an à Paris, où il avait travaillé dans une de ces ruches d’art, familiales et cosmopolites à la fois, que recèle l’immense laboratoire de la Rive Gauche. Nous échangions nos souvenirs sur le cher vieux Quartier ; les miens, plus fanés naturellement ; les siens contenant des coins obscurs où je sentais des relents de fumerie d’opium dans des ateliers très clos… Il avait gardé une correspondance nourrie avec un de ses anciens camarades parisiens dont il vantait avec enthousiasme l’intellectualité aiguë et « magnétique ». Souvent, je le voyais porter vers un de ces étranges cylindres vermillon que sont les « letter-box » anglaises des missives pour Paris surchargées de deux ou trois timbres supplémentaires ; c’étaient de vrais volumes qu’il envoyait là-bas. Ça valait mieux, en somme, pour tuer le temps, que de siroter des absinthes en compagnie d’une femme empouacrée de blanc gras et de mascaro, comme fait la jeunesse masculine du boulevard Saint-Michel ; et la vie de cette petite ville universitaire était assez monotone pour quiconque ne s’intéressait pas aux sports.