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J’ai fui un beau jour, décidée à en finir net avec l’abrutissement de ma vie présente… On venait d’ouvrir à Cambridge un grand collège de filles, et une des fondatrices m’avait écrit pour me demander d’y accepter une fonction de professeur de l’histoire de l’art. Car il est à remarquer que toutes les places, tous les travaux d’édition lucratifs, se sont offerts à moi quand je n’en avais plus besoin. Je me suis installée au bord du Cam, près du « Bridge of Sighs », ce délicieux pont d’un moyen âge un peu truqué, mais complétant si bien le décor, et trempant ses arches capitonnées de mousse dans une eau froide, verte, obscure, qui contient à l’envers toute l’image immobile des rives ombreuses.

Ma maison — docilement pareille à celle de droite et de gauche — est en brique rouge foncé, sertie d’un galon de nette peinture blanche. Un lourd manteau de lierre y découpe ses contours géographiques ; des géraniums sous verre s’alignent correctement sous les vastes fenêtres à guillotine. (Lorsqu’on a essayé des fenêtres françaises, si faciles à manœuvrer,