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pendant que les trompes sonnaient avec force. Alors commença une lutte acharnée entre ces quatre-vingts chiens se ruant les uns sur les autres, hurlant, grondant, se disputant et s’arrachant les lambeaux sanglants de l’animal.

Ce spectacle, ces cris me révoltèrent ; je rentrai dans le salon dont les fenêtres donnaient sur la terrasse. M. Séchérin était descendu pour voir la curée de plus près. Je me sentais accablée, plus accablée que jamais d’un mal tout physique ; pour la première fois je me demandai quelle pouvait en être la cause.

Je tombai assise sur une chaise placée près d’une croisée à demi cachée par les rideaux. Je regardais machinalement le reflet des dernières clartés des torches vaciller et s’éteindre, car la curée était terminée, lorsque je vis Ursule et Gontran s’arrêter un instant devant cette croisée… Gontran enlaça la taille d’Ursule d’un de ses bras, et approcha ses lèvres de la joue de ma cousine, malgré une légère résistance de celle-ci…

Jamais je n’oublierai ce que je ressentis en ce moment : par une étrange fatalité, la douleur la plus atroce que j’eusse jamais ressentie