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que. Elle accepta résolument quelques toasts à ma santé que lui porta Gontran, et but, sans se faire trop prier, quelques verres de vin de Champagne, à la grande admiration de M. Sécherin qui ne cessait de s’écrier :

— C’est un vrai démon que ma femme !

Pour la première fois, en voyant l’animation, la gaîté, l’entrain de ma cousine, je pressentis ce qu’il y avait en elle de hardi et d’indomptable.

Jusqu’alors elle m’avait paru profondément dissimulée. Ses audacieux mensonges avaient toujours été enveloppés de formes hypocrites ; c’est en levant mélancoliquement au ciel ses grands yeux baignés de larmes qu’elle niait l’évidence ; mais en la voyant à table si joyeuse, si résolue ; mais en entendant ses saillies vives, imprévues, souvent étincelantes, je la trouvais plus dangereuse encore.

Mon mari ne cachait pas l’espèce d’admiration qu’elle lui inspirait. Une espèce de lutte d’esprit s’était établie entre elle et lui, souvent Gontran n’eut pas l’avantage. Il semblait presque fasciné, dominé par l’ascendant de cette