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une femme dans laquelle j’avais toute créance, mademoiselle Albin, que j’avais donnée pour gouvernante à ma fille, fut corrompue par les offres de M. Lugarto.

— Quelle infamie !

— Elle lui vendit la correspondance que j’avais toujours entretenue avec elle, ainsi que toutes les pièces qui se rattachaient à la naissance d’Emma, et que je lui avais confiées, les fréquents voyages de M. de Mortagne n’ayant pas permis à cet excellent ami de se charger de ce dépôt. Lorsque mon mari m’eut arraché une dernière concession, au chevet de ma fille mourante, je fis vœu, si Dieu daignait la rendre à la vie, d’abandonner à jamais le monde et de passer la fin de mes jours dans une retraite qui aurait tous les caractères de la vie religieuse. Dieu eut pitié de moi, il a sauvé Emma : depuis ce vœu, je ne puis vous dire le calme dont je jouis… Mon existence va désormais se passer entre ma fille et l’exercice de cette religion dont je commence à comprendre la douceur infinie… Je suis si heureuse de cet avenir, Mathilde, si heureuse, que je tremble que quelque nouveau malheur ne