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duchesse de Richeville — je vous ai fait l’aveu des deux seules fautes que j’aie jamais commises… on m’a prêté bien des aventures, et pourtant, devant ce Dieu souverainement bon qui m’a rendu ma fille… je vous le jure, Mathilde… jamais je n’ai justifié les calomnies dont on m’a accablée. Je ne prétends pas nier mes torts, ils sont immenses… Mais si vous saviez que, mariée à seize ans à peine… à M. de Richeville, je fus, après quelques mois d’union, dédaigneusement, brutalement sacrifiée, et à quelles créatures, mon Dieu ! Pendant quatre ans, les succès que j’avais dans le monde suffirent pour me consoler du délaissement de mon mari ; pendant ces quatre ans d’ivresse, ou plutôt d’étourdissement, mon cœur sommeilla ; je n’aimai personne, mais je ne connus pas un moment d’ennui ; peu à peu je me lassai de ces fêtes, de cette existence vide et bruyante. Mon mari était parti pour l’Italie, où il resta deux ans ; j’étais seule, libre ; une mélancolie profonde s’empara de moi. Pour la première fois, les joies du monde ne me suffisaient plus. Que vous dirai-je, Mathilde… à cette époque, je ren-