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Dès que cette pensée me fut venue, je me crus sauvée ; le passé m’apparut sous un jour tout nouveau, je compris que l’exagération de mes sentiments romanesques avait dû mécontenter Gontran. Je compris qu’une femme avait sur la terre une autre mission à remplir que celle d’aimer, ou plutôt que, tout en brûlant pour un être unique et adoré, l’amour immense dont notre cœur est consumé devait jeter de généreux reflets sur tous ceux qui souffrent… de même que notre religion pour l’être unique et infini qui a créé les mondes doit se manifester par notre bonté et par notre pitié pour tous…

Le jour où cette pensée m’avait éclairée comme une révélation divine, j’attendis le retour de Gontran avec impatience.

Sans doute ma physionomie trahissait ma joie, mes espérances, car en me voyant, il me dit :

— Mon Dieu ! vous avez l’air bien joyeux…

— Mon ami, j’ai fait aujourd’hui une précieuse découverte.

— Comment cela ?

— J’ai découvert que vous aviez raison de