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fondé tant d’espérances s’écoulait pour moi morne, flétrie, décolorée.

Selon mon habitude, je concentrai mon chagrin jusqu’à ce qu’il débordât ; le jour arriva où je ne pus souffrir davantage.

Je me décidai à parler, à tout dire à Gontran.

C’était un samedi ; il avait fait un vent violent pendant presque toute la journée ; sans doute la chasse de Gontran avait été mauvaise, car le soir, lorsqu’il rentra au château, ses piqueurs ne sonnèrent pas leurs fanfares accoutumées.

Je le savais par expérience, ces jours-là mon mari avait de l’humeur ; j’allai craintive à sa rencontre ; mon cœur se serra lorsque j’entendis résonner ses grosses bottes éperonnées sur les dalles de l’escalier.

— Votre chasse n’a pas été heureuse, mon ami ? — lui dis-je.

— Non ; je suis harassé — me dit-il, et il entra dans un petit salon où je me tenais de préférence, parce que ma mère l’avait occupé.

M. de Lancry se jeta sur un canapé, l’air soucieux et contrarié, sans me dire un seul mot.