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Je me demandai avec douleur en quoi j’avais démérité. Ne devais-je pas au contraire lui être plus chère encore ? n’avais-je pas déjà bien souffert pour lui ?

À ce premier mouvement si pénible succéda la réflexion.

J’eus honte de moi-même. Je m’accusai d’égoïsme, d’exagération ridicule et romanesque.

Quoi de plus simple, de plus naturel, que ce sommeil que je reprochais à Gontran ? Devait-il se gêner, se contraindre pour moi ? n’agissait-il pas au contraire avec une confiance pleine de sécurité ?

Je séchai mes larmes, je contemplai ses traits. On n’y voyait déjà plus les traces des fatigues et des chagrins qui les altéraient jadis.

Jamais il ne m’avait paru plus beau de cette beauté délicate, charmante, qui rendait sa physionomie si attrayante ; un de ces demi-sourires qui annoncent toujours un sommeil heureux et tranquille, donnait à sa bouche une ravissante expression de finesse un peu malicieuse. Par deux fois il agita légèrement ses lèvres comme s’il eut prononcé quelques paroles.