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n’y a rien de plus triste au monde… si ce n’est d’entendre sans cesse parler des résultats merveilleux de cette même fabrique, du nombre d’ouvriers qu’elle emploie, de son importance dans le pays, etc. Il faudra, ma pauvre Mathilde, te résigner à supporter souvent ces conversations-là. Quel changement pour toi, habituée à cette brillante vie du monde que, hélas ! je n’ai fait qu’entrevoir avant de venir m’enterrer ici.

Je regardai Ursule avec un air de reproche.

— Ma sœur, ma sœur — lui dis-je — je crains d’avoir encore à te gronder ; je suis sûre que tu médis de ton bonheur… Ah ! crois-moi, ce monde… ce monde dont nous nous faisions de si brillantes imaginations, ce monde est bien triste et bien méchant. Combien je préférerais à ses faux plaisirs l’existence paisible que tu mènes ici.

Ursule me regarda avec surprise.

— Toi… toi — me dit-elle — tu envierais mon sort… Tu es donc bien malheureuse, Mathilde !… Que t’est-il donc arrivé ? Tu m’as donc caché quelque chose ?

— Non, ma chère Ursule — me hâtai-je de