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incapable de reprendre par cupidité les dons qu’il a faits.

Le père d’Aigrigny eut alors autant de peine à contenir sa joie, que naguère il avait eu de peine à cacher sa terreur ; pourtant, il parut assez calme et dit à Gabriel :

— Je n’attendais pas moins de vous, mon cher fils.

Puis il fit un signe à Rodin pour l’engager à intervenir.

Celui-ci comprit parfaitement son supérieur ; il quitta la cheminée, se rapprocha de Gabriel, s’appuya sur une table où l’on voyait une écritoire et du papier ; puis, se mettant à tambouriner machinalement sur le bureau du bout de ses doigts noueux, à ongles plats et sales, il dit au père d’Aigrigny :

— Tout ceci est bel et bon ;… mais monsieur votre cher fils vous donne pour toute garantie de sa promesse… un serment… et c’est peu…

— Monsieur ! s’écria Gabriel.

— Permettez, dit froidement Rodin ; la loi, ne reconnaissant pas notre existence, ne peut reconnaître les dons faits en faveur de la compagnie… Vous pouvez donc reprendre demain ce que vous aurez donné aujourd’hui.

— Et mon serment, monsieur ? s’écria Gabriel.