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sive en s’adressant au père d’Aigrigny et lui montrant Gabriel d’un regard dédaigneux, monsieur votre cher fils est… prudent…

À ces mots de Rodin, Gabriel tressaillit ; une légère rougeur colora ses joues pâles ; ses grands yeux bleus étincelèrent d’un généreux courroux ; puis, fidèle aux préceptes de résignation et d’humilité chrétienne, il dompta ce moment d’emportement, baissa la tête, et, trop ému pour répondre, il se tut et essuya une larme furtive.

Cette larme n’échappa pas au socius ; il y vit sans doute un symptôme favorable, car il échangea un nouveau regard de satisfaction avec le père d’Aigrigny.

Celui-ci était alors sur le point de toucher à une question brûlante ; aussi, malgré son empire sur lui-même, sa voix s’altéra légèrement, lorsque, pour ainsi dire encouragé, poussé par un regard de Rodin qui devint extrêmement attentif, il dit à Gabriel :

— Un autre motif nous oblige encore à ne pas hésiter à vous délier de vos serments, mon cher fils… c’est une question toute de délicatesse… Vous avez probablement appris hier par votre mère adoptive que vous étiez peut-être appelé à recueillir un héritage… dont on ignore la valeur…