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blais quelquefois toute la journée à mon métier.

— Aussi, mademoiselle Angèle, le spéculateur dira : « Loger mes ouvriers à la porte de ma fabrique c’est obvier à cet inconvénient. Calculons : l’ouvrier marié paye en moyenne, dans Paris, deux cent cinquante francs par an[1], une ou deux mauvaises chambres et un cabinet, le tout obscur, étroit, malsain, dans quelque rue noire et infecte ; là il vit entassé avec sa famille ; aussi quelles santés délabrées ! toujours fiévreux, toujours chétifs ; et quel travail attendre d’un fiévreux, d’un chétif ? Quant aux ouvriers garçons, ils payent un logement moins grand, mais aussi insalubre, environ cent cinquante francs. Or, additionnons : j’emploie cent quarante-six ouvriers mariés ; ils payent donc à eux tous, pour leur affreux taudis, trente-six mille cinq cents francs par an ; d’autre part, j’emploie cent quinze ouvriers garçons qui payent aussi par an dix-sept mille deux cent quatre-vingts francs, total environ cinquante mille francs de loyer, le revenu d’un million. »

— Mon Dieu, M. Agricol, quelle grosse somme font pourtant tous ces mauvais petits loyers réunis !

  1. C’est, en effet, le prix moyen d’un logement d’ouvrier composé au plus de deux petites pièces et d’un cabinet, au troisième ou au quatrième étage.