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d’échapper à la honte, à une honte incurable que je sentirais toujours brûlante comme un fer chaud…

« Non, non, je serai calme… D’ailleurs, n’ai-je pas tantôt, devant lui, subi courageusement une terrible épreuve ? Je serai calme ;… il faut, d’ailleurs, que ma personnalité ne vienne pas obscurcir cette seconde vue, si clairvoyante pour ceux que j’aime.

« Oh ! pénible… pénible tâche… Car il faut aussi que la crainte même de céder involontairement à un sentiment mauvais ne me rende pas trop indulgente pour cette jeune fille. Je pourrais de la sorte compromettre l’avenir d’Agricol, puisque ma décision, dit-il, doit le guider.

« Pauvre créature que je suis !… Comme je m’abuse ! Agricol me demande mon avis, parce qu’il croit que je n’aurai pas le triste courage de venir contrarier sa passion ; ou bien, il me dira : « Il n’importe… j’aime… et je brave l’avenir… »

« Mais alors, si mes avis, si l’instinct de mon cœur, ne doivent pas le guider, si sa résolution est prise d’avance, à quoi bon demain cette mission si cruelle pour moi ?

« À quoi bon ? à lui obéir. Ne m’a-t-il pas dit : Viens !