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déchirantes, du moins toujours écoute, toujours se souvient ?

Lorsque son cœur déborda d’émotions, tantôt tristes et douces, tantôt amères et déchirantes, la pauvre ouvrière, trouvant un charme mélancolique dans ces épanchements muets et solitaires, tantôt revêtus d’une forme poétique, simple et touchante, tantôt écrits en prose naïve, s’était habituée peu à peu à ne pas borner ces confidences à ce qui touchait Agricol ; bien qu’il fût au fond de toutes ses pensées, certaines réflexions que faisait naître en elle la vue de la beauté, de l’amour heureux, de la maternité, de la richesse et de l’infortune, étaient, pour ainsi dire, trop intimement empreintes de sa personnalité si malheureusement exceptionnelle pour qu’elle osât les communiquer à Agricol.

Tel était donc ce journal d’une pauvre fille du peuple, chétive, difforme et misérable, mais douée d’une âme angélique et d’une belle intelligence développée par la lecture, par la méditation, par la solitude, pages ignorées qui cependant contenaient des aperçus saisissants et profonds sur les êtres et sur les choses, pris du point de vue particulier où la fatalité avait placé cette infortunée.

Les lignes suivantes, çà et là brusquement