Page:Sue - Le Juif errant - Tomes 5-6.djvu/499

Cette page a été validée par deux contributeurs.

au mariage !… oh ! alors comme l’on confie d’abord à sa sœur ce que l’on soumet ensuite à son père et à sa mère, ma bonne Mayeux sera la première instruite. »

— Tu es bien bon, Agricol !…

— Eh bien !… le quelque chose de sérieux est arrivé… je suis amoureux comme un fou et je songe au mariage.

À ces mots d’Agricol, la pauvre Mayeux se sentit pendant un instant paralysée ; il lui sembla que son sang s’arrêtait et se glaçait dans ses veines ; pendant quelques secondes… elle crut mourir… son cœur cessa de battre… elle le sentit, non pas se briser, mais se fondre, mais s’annihiler… Puis, cette foudroyante émotion passée, ainsi que les martyrs qui trouvaient dans la surexcitation même d’une douleur atroce cette puissance terrible qui les faisait sourire au milieu des tortures, la malheureuse fille trouva, dans la crainte de laisser pénétrer le secret de son ridicule et fatal amour, une force incroyable ; elle releva la tête, regarda le forgeron avec calme, presque avec sérénité, et lui dit d’une voix assurée :

— Ah ! tu aimes quelqu’un… sérieusement ?

— C’est-à-dire, ma bonne Mayeux, que, depuis quatre jours… je ne vis pas… ou plutôt je ne vis que de cet amour…