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aussitôt, fîmes halte. On était parvenu devant un long demi-cercle de maisons éminemment respectables, donnant sur un jardin ; et voici que nos compagnons commençaient à arracher les plaques des portes et les cordons des sonnettes !

« Oh ! fit Byfield, cela va trop loin ! Que diable, je suis un homme sérieux, un personnage public ! Je ne puis pas m’exposer à être ramassé par la police !

— Eh ! tel est aussi mon cas, exactement ! répondis-je.

— Eh bien, lâchons-les ! »

Sur quoi, nous retournant, nous nous dirigeâmes de nouveau vers le faubourg.

En vérité, il n’était que temps ! Bientôt retentirent des voix et des cloches d’alarme, les veilleurs de nuit agitèrent leurs crécelles : évidemment l’Université de Cramond allait enfin entrer en bataille ouverte avec la police d’Édimbourg ! Byfield et moi, poussant devant nous les restes de Rowley, nous nous hâtâmes de fuir le théâtre du combat. L’aéronaute ne décolérait pas.

« Un scandale, monsieur ! Et toute la ville qui se prépare à assister à mon ascension, après-demain matin ! Voyez-vous le scandale ? Byfield l’aéronaute à la cour de police ! »

Il eut cependant l’obligeance, malgré son agitation, de m’aider à traîner Rowley jusqu’à notre porte. Mais une nouvelle épreuve me restait à affronter. Après avoir dépensé une énergie surhumaine pour faire parvenir Rowley au haut de l’escalier, je fus accueilli par mon hôtesse, debout sur le seuil, avec un haut bonnet de nuit blanc et une expression étrangement amère. Elle nous éclaira jusque dans le salon, où sous ses yeux, j’installai mon domestique dans un fauteuil. Alors, elle commença, d’une voix tremblante d’émotion :

« Je dois vous avertir, monsieur Ducie ! Dans une maison convenable… »

Sur quoi elle se trouva, apparemment, débordée par son émotion, et s’en alla sans un mot de plus.