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manquer de partenaires, peut-être ne refuserez-vous pas d’affronter, ce soir même, l’ennui d’un petit thé intime chez un vieux garçon. Je réunis chez moi, après le dîner, mes nièces et mes neveux, voire mes petits-neveux et mes petites-nièces, ainsi que quelques clients avec leurs enfants. Je pourrai vous montrer, tout de suite, une ou deux jeunes personnes qui méritent d’être vues, et que vous retrouverez avec plaisir au bal de jeudi. Je vous présenterai notamment mon amie préférée, miss Flora Gilchrist, qui est une vraie perle… Mais je ne vais pas essayer de vous la décrire ; mieux vaut que vous vous rendiez compte par vous-même de ce qu’elle est ! »

La soirée de M. Robbie n’était en effet qu’une petite réunion « intime » : non pas à cause du petit nombre des invités, car, au contraire, les deux salles en étaient toutes remplies, mais parce que l’on ne s’était pas mis en grands frais pour les divertir. Dans l’une des deux pièces, on avait simplement disposé quelques tables, où les personnes mûres étaient solennellement occupées à jouer au whist ; dans la seconde, un peu plus grande, une trentaine de jeunes gens des deux sexes s’entretenaient languissamment, les dames assises sur des chaises, et attendant qu’on leur fît la cour, les hommes debout, dans des attitudes diverses de galanterie ou d’indifférence. On ne dansait pas, on ne jouait à aucun jeu de société ; l’unique ressource était la conversation, sauf pour celle-ci à être modifiée ou stimulée par un certain nombre de Keepsakes qui se trouvaient épars sur les deux tables, et dont quelques jeunes beaux, de temps à autre, montraient les illustrations aux dames. M. Robbie lui-même avait son siège ordinaire dans la salle des cartes ; parfois seulement, entre deux parties, il faisait une rapide incursion au milieu de la jeunesse, se roulant jovialement d’une jeune fille à l’autre comme une image parfaite de l’oncle universel.

Ce digne homme avait, par hasard, rencontré Flora dans l’après-midi. « Venez sans faute, miss Flora, lui avait-il