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une impulsion irrésistible s’empara de lui. Il rouvrit le clavier, et, les yeux levés au plafond, fit courir ses doigts sur les touches muettes.

Quand M. Pitman rentra dans l’atelier, il trouva son guide et sauveur occupé à accomplir des prodiges de virtuosité sur l’Érard silencieux.

— Que le ciel me vienne en aide ! songea le petit homme. Il a bu toute la bouteille, et le voilà complètement ivre !

— Monsieur Finsbury ! dit-il tout haut.

Et Michel, sans se relever, tourna vers lui un visage fortement rougi, que bordaient les touffes rouges des favoris, et au milieu duquel s’étalaient les majestueuses lunettes.

— Capriccio en sol mineur sur le départ d’un ami ! se borna-t-il à répondre, tout en continuant la série de ses arpèges.

Mais, soudain, l’indignation s’était éveillée dans l’âme de Pitman.

— Pardon ! s’écria-t-il. Ces lunettes devaient être pour moi ! Elles forment une partie essentielle de mon déguisement !

— Je suis résolu à les porter moi-même ! répondit Michel.

Après quoi il ajouta, non sans une certaine apparence de vérité :

— Et les gens seraient capables de soupçonner