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tapis, le sofa encombré de livres et de linge, les plumes rouillées, le papier glacé d’une épaisse couche de poussière ; mais tout cela n’était que de petites misères à côté, et la vraie source de la dépression de Maurice consistait dans ces faux avortés qui, peu à peu, commençaient à épuiser toute la provision du papier à lettres.

« C’est la chose la plus extraordinaire du monde ! » gémissait-il. « Tous les éléments de la signature y sont, les jambages, les liaisons ; et l’ensemble s’obstine à ne pas marcher ! Le premier commis de banque venu flairera le faux ! Allons, je vois que je vais avoir à calquer ! »

Il attendit la fin d’une averse, s’appuya contre la fenêtre, et, à la vue de tout John Street, calqua la signature de son oncle. Encore n’en produisit-il qu’un bien pauvre décalque, timide, maladroit, avec toute sorte d’hésitations et de reprises dénonciatrices.

« N’importe ! Il faudra que cela passe ! se dit-il en considérant tristement son œuvre. De toute façon, l’oncle Joseph est mort ! »

Après quoi il remplit le chèque, ainsi orné d’une fausse signature : deux cents livres sterling, y inscrivit-il ; et il courut à la banque Anglo-Patagonienne où étaient déposés les fonds de la maison de cuirs.