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affreux périls ; et son premier mot, quand il recouvra la parole, fut pour demander si nous avions vu Secundra Dass.

– Vu quoi ? s’écria Sir William.

– Non, dis-je, nous ne l’avons pas vu. Pourquoi ?

– Pas vu ? dit Mountain. Alors, c’était moi qui avais raison.

Et il porta la main à son front.

– Mais quoi donc, en ce cas, le fait retourner en arrière ? cria-t-il. Qu’est-ce qui le ramène au milieu des cadavres ? Il y a là-dessous quelque maudit mystère.

Cette phrase excita vivement notre curiosité, mais je ferai mieux de raconter ici les événements selon leur ordre chronologique.

Voici une narration que j’ai puisée à trois sources différentes, qui ne concordent pas de tous points :

1° Une déposition par écrit de Mountain, où les faits criminels sont habilement déguisés ;

2° Deux conversations avec Secundra Dass ;

3° Plusieurs conversations avec Mountain lui-même, dans lesquelles il voulut bien se montrer entièrement franc ; car à vrai dire il me croyait de complicité.


Récit de Mountain le Trafiquant


L’équipage qui remonta le fleuve sous le double commandement du capitaine Harris et du Maître comptait en tout neuf personnes, dont il n’était pas une (à l’exception de Secundra Dass) qui n’eût mérité l’échafaud. Depuis Harris jusqu’au dernier, les voyageurs étaient bien connus dans cette colonie pour de parfaits et sanguinaires mécréants ; plusieurs réputés pirates, les autres fraudeurs de rhum ; tous fanfarons et ivrognes ; tous dignes associés, tous s’embarquant à la fois sans remords dans ce dessein perfide et meurtrier. Je ne pense pas qu’il y eut beaucoup de discipline