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de nom assez dur pour qualifier ma maladresse. Elle procédait cependant de la meilleure intention.

Je lui avouai tout avec simplicité, tel que je l’expose ici. Après m’avoir écouté, elle se recueillit, et je m’aperçus que sa colère s’apaisait.

– Oui, dit-elle, votre intention était bonne. J’ai eu, moi aussi, la même idée, ou plutôt la même tentation, ce qui fait que je vous pardonne. Mais, grand Dieu, ne comprenez-vous pas qu’il n’en peut supporter davantage ? Il n’en peut plus supporter !… La corde est tendue à se rompre. Qu’importe l’avenir, si le présent est supportable ?

– Amen, dis-je. Je ne me mêlerai plus de rien. Je suis bien aise que vous reconnaissiez la pureté de mes intentions.

– Oui, dit Mylady ; mais une fois le moment venu, je pense que le courage vous a manqué ; car vous avez parlé d’une façon fort cruelle.

Elle se tut, me considéra ; puis soudain, elle eut un léger sourire, et me dit cette phrase singulière :

– Savez-vous ce que vous êtes, Mr. Mackellar ? Vous êtes une vieille fille.

Aucun autre incident notable ne survint dans la famille jusqu’au retour de cet oiseau de mauvais augure, le Maître. Mais je dois insérer ici un second extrait des mémoires du chevalier Burke, intéressant par lui-même, et tout à fait nécessaire à mon dessein. Ces pages contiennent nos seuls renseignements sur les voyages du Maître dans l’Inde ; et on y voit pour la première fois apparaître Secundra Dass. Un fait, en outre, y est clairement indiqué, fait dont la connaissance, il y a vingt ans, nous eût épargné bien des malheurs et des chagrins ! le fait que Secundra Dass savait l’anglais.