Page:Stevenson - Le Maître de Ballantrae, 1989.djvu/106

Cette page n’a pas encore été corrigée

pas la connivence gouvernementale ? Vous savez combien de fois déjà la sécurité de l’homme nous a étonnés.

– Attendez, dit Mr. Henry. Laissez-moi réfléchir.

Et peu à peu je vis naître sur son visage ce sourire féroce qui ressemblait un peu à celui du Maître.

– Donnez-moi du papier, dit-il.

Et, sans un mot de plus, il s’assit pour écrire à un gentleman de ses connaissances, – le nom est inutile, mais c’était quelqu’un de haut placé. Je fis porter cette lettre par le seul messager auquel je pusse me fier en l’occurrence, – Macconochie. Le vieil homme dut galoper, car il était revenu avec la réponse avant même que mon impatience osât commencer à espérer. En la lisant, Mr. Henry eut le même sourire féroce. « Voici le meilleur tour que vous nous ayez fait encore, Mackellar, dit-il. Avec ce document, je vais lui donner une fière secousse. Observez-nous au dîner. »

Au dîner donc, Mr. Henry proposa une visite où le Maître serait fort en vue ; et, comme il s’y attendait, Mylord objecta le danger.

– Oh ! dit Mr. Henry d’un air détaché, ce n’est plus la peine de m’en faire un secret. Je suis dans la confidence tout comme vous.

– La confidence ? dit Mylord. Un secret ? Que voulez-vous dire, Henry ? Je vous donne ma parole que je n’ai pas de secret dont vous soyez exclu.

Le Maître avait changé de contenance, et je vis qu’il était touché au défaut de la cuirasse.

– Comment ? lui dit Mr. Henry, d’un air fort étonné. Je sais que vous servez vos maîtres avec fidélité ; mais je me figurais que vous aviez eu pitié de notre père, et l’aviez tranquillisé.

– De quoi parlez-vous ? Je ne veux pas que l’on discute mes affaires en public. J’ordonne que cela cesse, s’écria le Maître, avec une folle impétuosité, plus digne d’un enfant que d’un homme.

– On n’attendait pas de vous semblable discrétion, je vous affirme, continua Mr. Henry. Car voici ce que m’écrit mon correspondant – (il déploya le papier, et