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— David Balfour ! répéta-t-il, en élevant beaucoup la voix. Et d’où venez-vous, monsieur David Balfour, demanda-t-il en me regardant bien en face, d’un air froid.

— J’ai passé par bien des endroits étranges, monsieur, dis-je, mais je crois qu’il serait préférable de vous dire où et comment, dans un lieu moins public.

Il parut réfléchir un moment en appuyant la main sur ses lèvres, et me regardant de temps à autre, sur la chaussée de la rue.

— Oui, en effet, cela vaudra mieux, dit-il.

Et il me fit entrer chez lui, cria à une personne, que je ne voyais pas, qu’il serait occupé toute la matinée, et me conduisit dans une petite chambre poudreuse, pleine de livres et de dossiers.

Là, il s’assit, et me fit asseoir, tout en jetant des regards inquiets qui allaient de sa belle chaise à mes haillons boueux.

— Et maintenant, dit-il, si vous avez quelque affaire, soyez bref, et arrivez promptement au fait : Nec gemino bellum Trojanum orditur ab ovo[1].

— Je me conformerai au conseil d’Horace, monsieur, dis-je en souriant, et j’entrerai de plain-pied in medias res.

Il hocha la tête, comme s’il était satisfait, et en effet, le bout de latin qu’il m’avait cité avait pour but de m’éprouver.

Néanmoins, et malgré ce petit encouragement, le sang me monta à la figure quand j’ajoutai :

— Je crois avoir quelque motif de réclamer la possession du domaine de Shaws.

Il prit dans un tiroir un dossier et l’ouvrit devant lui.

  1. Et ne débutez point dans le récit de la guerre de Troie par l’œuf des Jumeaux.