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Lorsqu’il prononça ces mots, ses dents se serrèrent, et il cessa de parler.

J’ai vu bien des figures terribles, mais jamais d’aussi terribles que celle d’Alan quand il prononça ce nom de Renard Rouge.

— Qui est-il donc, ce Renard Rouge ? demandai-je, la curiosité l’emportant sur mon effroi.

— Qui il est ? s’écria Alan. Eh bien ! Je vais vous le dire. Quand les hommes des clans eurent été dispersés à Culloden, et que la bonne cause succomba, que les chevaux marchèrent jusqu’au pâturon dans le meilleur sang du Nord, Ardshiel dut fuir comme un pauvre daim sur les montagnes, avec sa femme et ses enfants. Ce fut une terrible affaire pour nous que de les embarquer, et quand il était encore dans la lande, les gredins d’Anglais, ne pouvant s’emparer de sa personne, s’en prirent à ses droits. Ils le dépouillèrent de tout ce qu’il possédait. Ils lui enlevèrent ses terres. Ils désarmèrent tous les hommes de son clan, qui avaient porté les armes pendant trente siècles. Oui, ils leur ôtèrent même les vêtements qu’ils avaient sur le dos, de sorte qu’aujourd’hui c’est un délit de porter un plaid à tartan, et on peut jeter un homme en prison rien que parce qu’il a un kilt autour des jambes. Il y a quelque chose qu’ils n’ont pas pu tuer, c’est l’affection que les hommes du clan avaient pour leur chef. Ces guinées en sont la preuve. Et voilà que maintenant arrive un individu, un Campbell, Colin le Roux, de Glenure.

— C’est lui que vous appelez le Renard Rouge ?

— Voulez-vous m’apporter sa tignasse ? s’écria Alan, d’un ton furieux. Oui, c’est cet homme. Il arrive avec des papiers signés du roi George, pour remplir les fonctions de soi-disant intendant du Roi sur les terres d’Appin. Tout d’abord il se fait tout petit, il est à