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tout à fait hors de portée des touristes, j’ai reçu la même hospitalité simple et digne.

J’ai mentionné deux faits, la conduite déplaisante de nos premiers visiteurs et le cas de la dame se frottant aux coussins, qui pourraient donner une très fausse opinion des manières marquésanes. La grande majorité des Polynésiens ont d’excellentes manières, mais le Marquésan est à part : ennuyeux et attrayant, sauvage, timide et raffiné. Si vous lui faites un cadeau, il affecte de l’oublier, et il faut le lui offrir encore à son départ : jolie formalité que je n’ai rencontrée nulle part ailleurs. Un simple mot vous débarrasse d’un seul, comme d’une foule, tant ils sont farouchement fiers et modestes — alors que dans d’autres îles, les habitants, plus aimables, mais plus frustes, se presseront autour de l’étranger, tenaces comme des mouches. Un manquement ou une insulte, le Marquésan ne les oublie jamais. J’étais un jour au bord du chemin à causer avec mon ami Hoka, lorsque je vis soudain son regard s’enflammer et sa taille se redresser. Un Blanc à cheval descendait de la montagne. Tout le temps qu’il fut à échanger des salutations avec moi, Hoka ne cessa de le dévorer des yeux et de s’ébouriffer comme un coq de combat. C’était un Corse qui, des années auparavant, l’avait appelé cochon sauvage, « coçon chauvage », prononçait Hoka. Avec des gens si ingénus et susceptibles, on peut imaginer si nos patauds de l’équipage les offensaient par étourderie. Durant une de