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L’élision des consonnes médianes, si nette dans ces exemples marquesans, n’est pas moins habituelle au gaélique[1] et chez les Écossais du Lowland[2]. Fait encore plus étrange, le son polynésien dominant, cette aspiration figurée par une apostrophe, qui est si souvent la pierre tombale d’une consonne morte, s’entend aujourd’hui même en Écosse. Quand un Écossais prononce water, better, ou bottle[3] : « wa’er, be’er, bo’le », l’aspiration est la même exactement ; et je crois pouvoir aller plus loin, et dire que si une telle population était isolée, et que ce défaut de prononciation devînt la règle, il apparaîtrait sans doute comme le premier stade de la transmutation du t en k, qui est la maladie des langues polynésiennes. D’ailleurs, les Marquésans ont une tendance à mener une vraie guerre d’extermination contre les consonnes, ou au moins la lettre l, si commune. Un hiatus enchante les oreilles polynésiennes : l’oreille même d’un étranger s’accoutume bientôt à ces lacunes barbares ; mais c’est le marquésan seul qui possède des noms comme Haaii et Paaaeua, où chaque voyelle se prononce distinctement.

Cette sorte de ressemblance entre un peuple des

  1. Le gaélique — l’un des dialectes de la langue celtique — comprend : l’irlandais, l’écossais (du Highland) et le manxois, qui se parle dans l’île de Man. (N.d.T.)
  2. Ceux-ci ne possèdent pas, comme les Highlanders, une langue spéciale, mais parlent un dialecte particulier de la langue anglaise. (N.d.T.)
  3. = Eau, mieux, bouteille. (N.d.T.)