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Pauillac pour qui arrive par la Gironde.

Au retour sur le bateau, écrasé par les rafales d’une pluie horrible, j’éprouve la vérité de ce mot de M. Gagnon : « Par la lecture on échange les moments d’ennui que l’on a dans la vie contre des moments agréables. » Le seul livre que j’eusse était d’un plat courtisan, et cependant le bateau a passé devant Blaye sans que je m’en aperçusse.

(Le bonheur d’avoir pour métier sa passion. État de Dominique.)

Enfin je revois l’admirable coteau de Lormont, cette suite de mamelons couronnés de fabriques et de grands arbres.

Le soir, thé chez Madame Mathé. Monsieur a été sur le point d’acheter la terre de Montaigne où est né cet illustre auteur. La chambre est encore ornée des fresques qu’il a vues. Cette terre a huit fermes ; elle vaudrait aujourd’hui…[1] ; malheureusement on a détruit les bois. On sait que le grand-père de Montaigne l’avait achetée dix mille francs.

Le soir, bal masqué ; on danse dans la salle de spectacle et dans une charmante salle de concerts. On m’a conduit dans une belle loge. Le carême et le qu’en dira-t-on, cruelle maladie qui tourmente

  1. En blanc dans le manuscrit. N. D. L. E.