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remment ce noble vieillard que je voyais autrefois chez M. de T[racy].)

Je regardais en passant devant tous les horlogers si la demi-heure serait bientôt dépassée. Exquise propreté de mon petit dîner composé strictement d’une cuisse de confit et de bien peu de pommes de terre. J’en avais demandé beaucoup.

Il pleuvait toutes les heures ; puis venait une éclaircie. C’est le temps que nous procure ce damné vent d’ouest qui verse sur nous toutes les eaux pompées dans l’Océan. Je profite d’une éclaircie pour parcourir de nouveau le village. Il y a des cafés mais pas de lait.

La pluie recommençant, je me réfugie dans la cuisine de l’auberge. C’est là que j’ai admiré l’exquise propreté. On a successivement fait à dîner pour quatre ou cinq arrivants. Je n’ai jamais rien vu d’aussi propre. Je voyais avec plaisir faire cette cuisine ; j’avais presque envie de redîner. Figure et regard plus qu’à demi espagnols de la maîtresse de la maison, femme de trente ans, fort sérieuse.

Deux vieilles servantes fort polies, mais d’une politesse plus fine qu’à Paris même, me font des questions indirectes pour tâcher de savoir ce qui diable a pu me faire venir à Lesparre. J’ai acheté un cahier de papier pour écrire ce vénérable journal.