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servatoire porte des jaquettes couleur capucin et des ceintures rouges d’un bon effet ; le collet de la chemise est renversé sur une cravate noire. Tout cela n’est pas mal ; le chœur aussi n’est pas mal. Ce qui est incroyable c’est la musique qu’ils ont chantée. Elle est d’une platitude et d’un gauche inimaginables. Il faudrait avoir du génie pour pouvoir se figurer cet excès de vide. Pas la plus petite idée ; la Juive est une œuvre de génie comparée à cette musique. Pas une étincelle d’originalité. Les paroles sont dignes de la musique. Dans les morceaux il est question à tout moment d’Apollon. Quand l’auteur veut être léger, il s’écrie :

Si, de mon sort j’étais maître,
Je voudrais naître
Un léger papillon.

Ces pauvres jeunes gens ont le mérite de chanter toutes ces belles choses sans accompagnement. Leur affiche dit qu’ils vont à Paris. Quand ils seraient protégés par tous les journaux, il est impossible qu’un parterre parisien tolère un tel amas de platitude et de contresens. L’auteur n’a eu des allures tragiques que pour parler d’un contrebandier :

qui passe malgré les lois.