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tous ceux qui venaient chez le maître d’école.

Il faut avouer, mon ami, qu’en France, dans une classe du peuple aussi pauvre que la famille de Haydn, il n’est guère question de musique.

La nature avait donné à Haydn une voix sonore et délicate. En Italie, à cette époque, un tel avantage eût pu devenir funeste au petit paysan : peut-être Marchesi eût eu un émule digne de lui, mais l’Europe attendrait encore son symphoniste. Frank, donnant à son jeune cousin, pour me servir des propres expressions de Haydn, plus de taloches que de bons morceaux, mit bientôt le jeune tympaniste en état non seulement de jouer du violon et d’autres instruments, mais encore de comprendre le latin, et de chanter au lutrin de la paroisse, de manière à se faire une réputation dans tout le canton.

Le hasard conduisit chez Frank, Reüter, maître de chapelle de Saint-Étienne, cathédrale de Vienne. Il cherchait des voix pour recruter ses enfants de chœur. Le maître d’école lui proposa bien vite son petit parent : il vient ; Reüter lui donne un canon à chanter à première vue.

La précision, la pureté des sons, le brio[1]

  1. Je demande pardon de me servir de ce mot italien, ou plutôt espagnol, que je ne sais comment traduire : chanter