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Mozart n’y était point. Tout le monde s’accordait à dire que c’était un ouvrage très estimable, d’une imagination brillante et d’un génie riche ; mais tout le monde aussi y trouvait à reprendre. Tous avaient parlé, à l’exception du modeste Haydn. On le pria de dire son opinion. « Je ne suis pas en état de juger de cette dispute, dit-il avec sa retenue accoutumée : tout ce que je sais, c’est que Mozart est le plus grand compositeur qui existe dans ce moment. » On parla d’autres choses.

Mozart, de son côté, avait beaucoup d’estime pour Haydn. Il lui a dédié un recueil de quatuors qu’on peut mettre parmi ce qu’il y a de plus beau en ce genre. Un compositeur viennois, qui n’était pas sans quelque mérite, mais qui était bien loin de valoir Haydn, se faisait un malin plaisir de rechercher dans les compositions de ce dernier toutes les petites incorrections qui avaient pu s’y glisser. Il venait souvent trouver Mozart pour lui montrer avec joie des symphonies ou des quatuors de Haydn qu’il avait mis en partition, et où il avait découvert, par ce moyen, quelques négligences de style. Mozart tâchait toujours de changer le sujet de la conversation ; enfin, n’y pouvant plus tenir : « Monsieur, lui dit-il une fois d’un ton un peu brusque, si l’on nous fondait